7-3-5. H. Poincaré: Rapport sur la thèse de Meslin

[Ca. 21.03.1890]11endnote: 1 Le manuscrit porte une annotation de main inconnue: “21 Mars 1890”. Le rapport de Poincaré, rédigé et signé par lui, est accompagné d’un rapport signé par son collègue à la Faculté de sciences de Paris, Edmond Bouty, que nous n’avons pas transcrit.

La thèse de M. Meslin se termine par des considérations théoriques qu’il nous reste à apprécier.22endnote: 2 Meslin 1890. Il cherche à expliquer le retard subi par un rayon polarisé qui a traversé une lame métallique très mince ou qui s’est réfléchi sur une masse métallique ; et la principale originalité de l’explication qu’il propose consiste à ramener le second phénomène au premier.

En ce qui concerne d’abord le retard dû à la transmission, l’auteur l’attribue à une certaine couche de passage située dans le voisinage de la surface de séparation. Il fait une hypothèse particulière au sujet de la loi de ce retard ; cette hypothèse peut sembler un peu arbitraire ; il est vrai qu’il la justifie par l’accord des chiffres calculés et des chiffres observés, mais il est permis de se demander si cet accord n’aurait pas été aussi bon avec grand nombre de lois différentes. Un hypothèse dont on aperçoit moins encore la raison est celle que fait l’auteur dans le calcul du retard dû aux lames minces, qui sont précisément les seules sur lesquelles il soit possible d’observer. M. Meslin suppose que les influences des deux surfaces de séparation peuvent être tout simplement ajoutées algébriquement l’une à l’autre.

Pour expliquer le retard dû à la réflexion, M. Meslin suppose que les rayons qui ont pénétré dans le milieu métallique ne sont pas seulement absorbés en partie par les molécules du métal ; mais que ces molécules devenues des centres d’ébranlement rayonnent à leur tour dans toutes les directions. Le rayon réfléchi apparent sera le résultat de l’interférence d’une multitude de rayons qui auront subi la réflexion, le premier à la surface de séparation elle-même, les autres à différentes profondeurs au dessous de cette surface. Comme ces rayons partiels auront subi des retards variables, que la théorie de la transmission précédemment étudiée nous permet de calculer, il sera possible de calculer le retard du rayon résultant qui est le retard observé.

Cette ingénieuse théorie diffère peut-être moins qu’il ne semble au premier abord des théories anciennes, mais elle a sur elles un grand avantage ; au lieu de nous donner que des formules mathématiques abstraites, elle nous fait toucher les raisons physiques des phénomènes. Nous n’avons pas ici à la discuter en elle-même ; nous devons simplement nous demander si elle peut rendre des services au physicien en réunissant en une conception d’ensemble un grand nombre de phénomènes divers. Malgré les réserves que nous avons formulées plus haut, nous croyons qu’il en est ainsi et nous estimons qu’en la développant M. Meslin a fait une œuvre réellement utile.

Poincaré

ADS. AJ16 5535, Archives nationales françaises.

Time-stamp: " 1.07.2019 20:40"

Notes

  • 1 Le manuscrit porte une annotation de main inconnue: “21 Mars 1890”. Le rapport de Poincaré, rédigé et signé par lui, est accompagné d’un rapport signé par son collègue à la Faculté de sciences de Paris, Edmond Bouty, que nous n’avons pas transcrit.
  • 2 Meslin 1890.

Références

  • G. Meslin (1890) Sur la polarisation élliptique des rayons réfléchis et transmis par les lames métalliques minces. Ph.D. Thesis, Faculté des sciences de Paris, Paris. Cited by: endnote 2.