5-1-238. H. Poincaré à Eugénie Launois
[Ca. juin 1876]
Rien de bien neuf; hier visite à Courbevoie le soir j’ai rencontré c 1 baisse.11endnote: 1 Georges Antoine Henri Courbebaisse.
J’ai oublié de te dire quelle mercredi 3e journée il a fait un temps couvert mais sans pluie avec intervalles de grande chaleur solaire et que je n’étais pas tired; du reste j’étais en bus tout le temps.
3e journée suite
En arrivant à Caen, Badoureau me dit que Lecornu nous inviterons à venir prendre le café chez lui. Nous montons dans notre chambre et nous nous arrangeons comme nous pouvons; c’est à dire que j’extirpe mon pantalon granitique qui moisissait dans ma valise depuis … . Erratum; je l’avais retiré la veille en arrivant à Caen et il était déjà sec jusqu’à un certain point etc. etc. Nous dînons vers 10h nous sortons de table car nous avions dîné ce soir de très bonne heure vers 8 h . Lecornu nous attendait à la porte et nous conduit chez lui. Son père nous attendait à la porte et nous fait monter; Lecornu nous montre une portion de ses frères. Nous nous asseyons et on sert le café après présentation générale. Tout à coup Carcanague dit à Lecornu veux-tu que je te dénonce quelque chose voilà Bonnefoy qui n’a pas de café et qui n’ose pas en réclamer; et en effet la tasse qui lui était destinée se prélassait vide devant une chaise également vide. Tableau. Là-dessus entre Mme Lecornu qui se fait d’abord présenter Carcanague et lui fait toutes sortes de recommandations au sujet du voyage en Angleterre. Je lui ai parlé de nos connaissances caennaises. M. Villey n’est guère connue que de réputation mais une de ces réputations, M. Massieu très vaguement, M. Châtel davantage.22endnote: 2 François Massieu (1832–1896). Après le café on servit le champagne quelque bizarre que puisse te paraître un ordre pareil. Puis nous rentrâmes, j’ignore si le café de Lecornu était trop fort; mais toujours est-il que je taillai une bavette jusqu’à 1h avec Badoureau, puis avec Badoureau et Roche.
4e Journée
La 4e journée commence à 4h du matin où je me réveille je ne sais trop pourquoi, je descends; je réveille je ne sais quel larbin que je charge d’emballer bes fossiles. Enfin je me recouche, je ne puis m’endormir qu’à 4h45; à 5h30; il faut se lever; je me lève; je suis très fatigué tant parce que je n’ai pas dormi, tant et surtout parce que je n’ai pas fait du cidre un usage suffisant comme moyen de lessivage méthodique et que des obstructions se sont produites; presque absolues depuis Paris. Je ne promets de m’adonner désormais à la boisson normande et je monte en chemin de fer pour Bayeux; j’écris le topo et je dors bien. Enfin nous arrivons à Bayeux vers 8h45. Qu’y voyons-nous un sapin pouvant renfermer 6 personnes et qui nous attendait bravement. Grande Irae. Nous allons à pied pour faire une imposante manifestation au bureau des omnibus. Nous arrivons, l’affaire s’arrange mais il faut du temps; nous en profitons pour aller en seul homme à la cathédrale; grand ébahissement des Bajocéens.33endnote: 3 Alors que les habitant de Bayeux sont des Bayeusains ou des Bajocasses, Poincaré se réfère à eux par un terme de la nomenclature proposée par Alcide Dessalines d’Orbigny (1802–1857), afin de désigner les strates géologiques (en l’occurrence, celle de l’“inferior Oolite” en anglais). Devant la cathédrale, on se forme en bataille et on ouvre les parapluies; nouvel ébahissement. Puis on referme parapluies; on rompt les rangs et on visite l’église qui est très belle. Les bas côtés et les arêtes entre les bas côtés et la nef sont romans avec sculptures et ornementations bizarres. La nef est ogivale. Comme déjà quelques uns d’entre nous étaient sortis de l’église; un prêtre nous aborde et nous offre de nous montrer la salle di chapitre qui d’ailleurs n’a rien de bien extraordinaire sauf les mosaïques du parquet. Puis il nous conduit au musée; où il nous montre d’abord des photographies anglaises colorées de la tapisserie de la reine Mathilde; puis la tapisserie elle-même qui est une composition excessivement boquillonesque. Cependant on nous dit que les voitures sont prêtes et qu’on n’attend plus que nous; on ce sont des gamins attirés par notre aspect bizarre
AL 4p. Collection particulière, Paris 75017.
Time-stamp: "16.02.2023 16:18"
Notes
- 1 Georges Antoine Henri Courbebaisse.
- 2 François Massieu (1832–1896).
- 3 Alors que les habitant de Bayeux sont des Bayeusains ou des Bajocasses, Poincaré se réfère à eux par un terme de la nomenclature proposée par Alcide Dessalines d’Orbigny (1802–1857), afin de désigner les strates géologiques (en l’occurrence, celle de l’“inferior Oolite” en anglais).