4-31-3. Carl Friedrich Geiser à H. Poincaré

Küsnach–Zürich 4 Févr. 1886

Monsieur et très honoré collègue,

Vous excuserez, que j’ai tardé si longtemps de répondre à votre lettre du 7 Janvier. Voilà le motif : le conseil de l’école s’est réuni vers la fin du décembre de l’année passée pour décider sur la présentation d’un titulaire de la chaire de calcul diff. et intégral. En vue du résultat négatif des recherches en France on a élu Mr Franel, un jeune Vaudois, qui était autrefois élève de l’école polytechnique de Zürich. Plus tard il a été à Berlin pour compléter ses études ; à Paris il a passé des examens de licence. Deux années de professorat à l’école industrielle de Lausanne ont développé ses qualités pédagogiques et nous avons la certitude qu’il remplira ses devoirs envers nos élèves à notre pleine satisfaction.

Mais (comme je crois, je vous l’ai écrit antérieurement) il y avait à trancher une question plus générale. L’idée du conseil de l’école d’augmenter le nombre de nos chaires françaises devait elle tomber devant l’impossibilité de trouver des candidats convenables ? Malgré l’échec dans le cas actuel, on a cru de devoir maintenir, et le conseil fédéral dans une décision prise dans le courant du mois janvier a plaisamment partagé le point de vue de l’administration du Polytechnikum. Par conséquent le conseil de l’école ouvrira une enquête détaillée qui aura pour but de lier plus étroitement les intérêts de notre établissement aux intérêts de la science et de l’industrie de la France. Sans doute une délégation sera envoyée à Paris pour étudier les moyens les plus pratiques pour arriver au but. Je me permettrai de recommander ces Messieurs à votre bienveillant accueil, en supposant qu’en votre position vous trouverez l’occasion de faciliter notre entreprise.

Oserai-je vous dire, que les indications que vous avez eu la bonté de me donner sur les traitements de Mr Raffy, Brunel et Königs m’ont confirmé dans l’idée que nous réussirons avec nos intentions, dès que le gouvernement français déclarera aux jeunes savants qu’on peut „tenir place“ aussi à Zürich ; et telle était effectivement l’idée de feu Mr Dumont dont je regrette sincèrement la mort prématurée.11endnote: 1 Louis Raffy, Georges Brunel, and Gabriel Koenigs all successfully pursued their mathematical careers in France. Quant aux appointements je suis sûr que la confédération suisse fera son possible de satisfaire aux besoins de notre école. Si plus tard la possibilité s’ouvrira de pourvoir une chaire de mathématiques supérieures en langue française nous ne perdrons pas de vue les candidats dont je viens de parler, et nous noterons aussi le nom de Mr Hott, si toutefois il arrive à se distinguer par ses productions scientifiques.

Pardonnez, Monsieur et très honoré collègue, cette expansion de coeur sur un sujet à qui j’attache des espérances du premier ordre pour la prospérité de notre établissement et agréez l’expression de ma considération la plus distinguée.

C.F. Geiser

ALS 3p. Collection particulière, Paris 75017.

Time-stamp: "28.01.2021 13:47"

Notes

  • 1 Louis Raffy, Georges Brunel, and Gabriel Koenigs all successfully pursued their mathematical careers in France.