7-2-42. Felix Klein à H. Poincaré, traduction française

Leipzin, 19 Sept. 1882

Monsieur,

Étant en train de terminer un travail assez long sur les nouvelles fonctions, j’ai parcouru de nouveau votre article dans le tome 19 des Annalen.11endnote: 1 Klein (1883), Poincaré (1882b). Il y a un point que je ne comprends pas: vous mentionnez, en deux endroits (au milieu de la page 558 et en bas de la page 560), les “fonctions fuchsiennes” qui n’existent que dans un espace limité par une infinité de cercles normaux au cercle principal. Je connais en effet très bien ces fonctions (ainsi que je vous l’ai écrit il y a trois mois) qui ont comme limite naturelle une infinité de cercles. Mais au groupe correspondant appartiennent toujours les substitutions qui laissant invariant seulement un seul cercle limite, choisi au hasard. Vous désignez maintenant par fuchsiennes les fonctions dont toutes les substitutions sont réelles (p. 554), et cette définition ne se trouve pas sensiblement modifiée par la généralisation à la page 557, où vous remplacez l’axe réel par un cercle quelconque. Les fonctions que je connais ne rentrent pas dans votre définition des “fonctions fuchsiennes”. Y a-t-il, de ma part, une mauvaise interprétation, ou, de votre part, une imprécision dans la formulation ? En ce qui concerne mon travail, je me suis limité à l’exposé de la conception géométrique, grâce à laquelle je pense avoir défini les nouvelles fonctions au sens de Riemann. On y trouve, comme il est dans l’ordre des choses, beaucoup de points de contact avec votre conception géométrique du sujet. Les groupes les plus généraux que je considère sont engendrés par un nombre quelconque de substitutions “isolées” et par un certain nombre de groupes “avec un cercle principal” (qui peut être réel ou imaginaire, ou aussi réduit à un point) qui sont “emboîtés les uns dans les autres”. Les théorèmes de mes deux notes des Annalen deviennent alors des cas particuliers d’un théorème général, que l’on énonce ainsi : à chaque surface de Riemann avec ramification quelconque donnée et coupure correspond une fonction η\eta, et une seule, du type concerné.

J’ai appris par Mittag-Leffler que vous êtes justement occupé par d’importants travaux.22endnote: 2 See Poincaré (1882c), (1882a), (1883), (1884), and the reedition by Nörlund and Lebon (1916, 108–462). Je n’ai pas besoin de vous dire combien je serai intéressé d’en savoir davantage à leur sujet. Si vous êtes à Paris dans un mois, vous ferez la connaissance de mon ami S. Lie, qui vient de passer quelques jours avec moi, et qui, bien qu’il ne soit pas jusqu’ici théoricien des fonctions, s’intéresse vivement aux progrès réalisés récemment dans ce domaine.

Avec tous mes respects, votre

F. Klein

PTrL. Translated by S.A. Walter from the original German (§ 4-47-25). Previously translated by F. Poincaré in Dugac (1989, 119–120).

Time-stamp: " 2.05.2021 00:05"

Notes

Références

  • P. Dugac (1989) Henri Poincaré, la correspondance avec des mathématiciens (de J à Z). Cahiers du séminaire d’histoire des mathématiques 10, pp. 83–229. link1 Cited by: 7-2-42. Felix Klein à H. Poincaré, traduction française.
  • F. Klein (1883) Neue Beiträge zur Riemann’schen Functionentheorie. Mathematische Annalen 21 (2), pp. 141–218. link1 Cited by: endnote 1.
  • N. E. Nörlund and E. Lebon (Eds.) (1916) Œuvres d’Henri Poincaré, Volume 2. Gauthier-Villars, Paris. link1 Cited by: endnote 2.
  • H. Poincaré (1882a) Mémoire sur les fonctions fuchsiennes. Acta mathematica 1, pp. 193–294. link1 Cited by: endnote 2.
  • H. Poincaré (1882b) Sur les fonctions uniformes qui se reproduisent par des substitutions linéaires. Mathematische Annalen 19, pp. 553–564. link1 Cited by: endnote 1.
  • H. Poincaré (1882c) Théorie des groupes fuchsiens. Acta mathematica 1, pp. 1–62. link1 Cited by: endnote 2.
  • H. Poincaré (1883) Mémoire sur les groupes kleinéens. Acta mathematica 3, pp. 49–92. link1 Cited by: endnote 2.
  • H. Poincaré (1884) Mémoire sur les fonctions zétafuchsiennes. Acta mathematica 5, pp. 209–278. link1 Cited by: endnote 2.