2-56. William Thomson

William Thomson (1824–1907) fut le fils d’un professeur de mathématiques à l’Université de Glasgow, James Thomson. William fit des études avec son frère James à partir de 1834 à l’Université de Glasgow. Il devint familier des travaux français de mécanique analytique (Lagrange, Laplace, Fourier), et continue ses études en 1841 à l’Université de Cambridge, d’où il sort second wrangler en 1845. Pendant un séjour à Paris dans le laboratoire de Victor Regnault, il fit connaissance avec Liouville, Cauchy, Sturm, Biot, et Dumas. Il obtint la chaire de philosophie naturelle à l’Université de Glasgow en 1846, où il créa le premier laboratoire d’enseignement de physique en Grande-Bretagne. De 1890 à 1895 il fut président de la Royal Society de Londres.

Thomson contribua à la mécanique céleste, l’électricité et le magnétisme, et la thermodynamique. Lorsque Faraday découvrit la rotation du plan de polarisation de la lumière dans les corps transparents par l’action magnétique en 1845, Thomson s’en inspira en 1856 avec un modèle d’un éther solide élastique, dans lequel un courant galvanique donne lieu à une hélice dont l’axe coïncide avec celui du courant. Ce modèle, qui voulait expliquer l’ensemble des effets électromagnétiques, servit d’inspiration à J. C. Maxwell dans ses recherches d’une nouvelle théorie de l’électromagnétisme. Malgré cette influence, Thomson ne fut pas convaincu par la théorie de Maxwell, et suite aux recherches de Helmholtz sur les tourbillons, il conçut d’un programme de réduction des phénomènes physiques à l’interaction des atomes-tourbillons dans un fluide universel incompressible.11endnote: 1 Sur la théorie des tourbillons, voir Poincaré (1893, 1899, 348).

Avec son ami P. G. Tait, Thomson écrivit un des traités de physique les plus influents du XIXe siècle, le Treatise on Natural Philosophy (W. Thomson & P. G. Tait 1867). Il élabora également des d’appareillages nouveaux, dont un galvanomètre suffisamment sensible pour détecter les courants électriques transmis par des câbles de grande longueur. Suite au succès de la pose du câble transatlantique de liaison télégraphique en 1866, Thomson devint chevalier grand-croix de l’ordre royal de Victoria. Son activité politique à l’ouest de l’Écosse eut pour issu son anoblissement en 1892; il devint alors “Lord Kelvin, Baron of Largs”, le premier homme scientifique distingué ainsi.

Pendant le dernier trimestre de 1891, Thomson publia trois articles sur les conditions de stabilité des mouvements périodiques (W. Thomson 1891c, 1891a, 1891b), et prit connaissance du mémoire de Poincaré sur le problème des trois corps (Poincaré 1890). L’année suivante, il reprit (§ 2-56-5) sa critique (W. Thomson 1867, 381) des travaux de Lagrange et de Laplace à propos de l’analyse des petites oscillations autour d’une position d’équilibre, critique qu’il adressa également au travail de Poincaré. Ce fut l’occasion pour ce dernier de préciser sa méthode d’analyse des conditions de stabilité des solutions périodiques au moyen de l’étude de la nature des exposants caractéristiques (Poincaré, 1892, chap. 4).

Un échange de 1901 (§ 2-56-16) entre Thomson et Poincaré à propos de l’évaluation de la précession et de la nutation de l’axe de la terre montre leur intérêt pour les questions de géophysique. Thomson les aborda à travers un modèle du globe terrestre en tant que sphère fluide entourée d’une croûte solide.

S’appuyant sur la thermodynamique, Thomson et Helmholtz prédirent la mort thermique de l’univers, et ils cherchaient, dès les années 1860, à évaluer l’âge du Soleil. Poincaré rappella leurs idées à ces sujets dans ses Leçons sur les hypothèses cosmogoniques, en observant que la découverte du radium en 1898 rendit caduque leurs estimations de l’âge du Soleil (Poincaré 1911, 220).22endnote: 2 Thomson ne croyait pas que la découverte du radium rendait ses calculs obsolètes; voir sa lettre à James Orr du 29.01.1906, dans laquelle il maintient qu’il est “almost infinitely improbable” que le radium permette aux étoiles d’augmenter considérablement l’énergie disponible pour l’émission de la chaleur et de la lumière (Smith & Wise 1989, 550). Il reprit également la suggestion de Thomson selon laquelle la théorie cinétique des gaz permet d’estimer les dimensions de l’univers, à partir d’une connaissance de la vitesse des étoiles situées près du centre, et de la densité de masse moyenne (ibid., 258).33endnote: 3 Sur la vie de W. Thomson voir la notice de Poincaré (1908), S. P. Thompson (1910), Buchwald (1976), et Smith & Wise (1989).

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Notes

  • 1 Sur la théorie des tourbillons, voir Poincaré (1893, 1899, 348).
  • 2 Thomson ne croyait pas que la découverte du radium rendait ses calculs obsolètes; voir sa lettre à James Orr du 29.01.1906, dans laquelle il maintient qu’il est “almost infinitely improbable” que le radium permette aux étoiles d’augmenter considérablement l’énergie disponible pour l’émission de la chaleur et de la lumière (Smith & Wise 1989, 550).
  • 3 Sur la vie de W. Thomson voir la notice de Poincaré (1908), S. P. Thompson (1910), Buchwald (1976), et Smith & Wise (1989).

Références

  • J. Z. Buchwald (1976) Thomson, Sir William (Baron Kelvin of Largs). See Dictionary of Scientific Biography, Volume 13: Hermann Staudinger–Giuseppe Veronese, Gillispie, pp. 374–388. Cited by: endnote 3.
  • C. C. Gillispie (Ed.) (1976) Dictionary of Scientific Biography, Volume 13: Hermann Staudinger–Giuseppe Veronese. Charles Scribner’s Sons, New York. Cited by: J. Z. Buchwald (1976).
  • H. Poincaré (1890) Sur le problème des trois corps et les équations de la dynamique. Acta mathematica 13, pp. 1–270. link1 Cited by: 2-56. William Thomson.
  • H. Poincaré (1892) Les méthodes nouvelles de la mécanique céleste, Volume 1. Gauthier-Villars, Paris. link1 Cited by: 2-56. William Thomson.
  • H. Poincaré (1893) Théorie des tourbillons. Georges Carré, Paris. link1 Cited by: endnote 1.
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  • H. Poincaré (1911) Leçons sur les hypothèses cosmogoniques. Hermann, Paris. link1 Cited by: 2-56. William Thomson.
  • C. W. Smith and M. N. Wise (1989) Energy and Empire: A Biographical Study of Lord Kelvin. Cambridge University Press, Cambridge. Cited by: endnote 2, endnote 3.
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  • W. Thomson and P. G. Tait (1867) Treatise on Natural Philosophy. Clarendon, Oxford. link1 Cited by: 2-56. William Thomson, 2-56. William Thomson.
  • W. Thomson (1891a) On instability of periodic motion, being a continuation of article on periodic motion of a finite conservative system. Philosophical Magazine 32, pp. 555–560. link1 Cited by: 2-56. William Thomson.
  • W. Thomson (1891b) On instability of periodic motion. Proceedings of the Royal Society of London 50, pp. 194–200. link1, link2 Cited by: 2-56. William Thomson.
  • W. Thomson (1891c) On periodic motion of a finite conservative system. Philosophical Magazine 32, pp. 375–383. link1 Cited by: 2-56. William Thomson.