1-1-190. Gösta Mittag-Leffler à H. Poincaré
[4/3/1902]
Mon cher ami,
Il faut que je m’adresse à vous dans une affaire très délicate.
M. Duporcq a eu l’idée malheureuse de fabriquer une traduction
française des lettres de Weierstrass de ma communication “Une
page de la vie de Weierstrass”.11endnote:
1
Voir § 152.
Il a mis cette traduction sous les notes. Mais comme il ne comprend
pas l’allemand et surtout ne comprend pas les mathématiques,22endnote:
2
Duporcq
avait été le secrétaire du congrès des mathématiciens
de Paris et était donc chargé de l’édition des actes de
ce congrès. il a fait dire à Weierstrass toute espèce
de bêtises. J’ai donc fait corriger la traduction par un géomètre
français sérieux qui ne veut pas par égard à M. Duporcq
que je le nomme.33endnote:
3
Le traducteur désintéressé dont
parle Mittag-Leffler est Henri Vogt, professeur à l’université
de Nancy. En effet, Molk, à qui Mittag-Leffler s’était plaint
des traductions de Duporcq, avait indiqué que Vogt lui semblait
compétent pour ce travail.
Le 31 janvier, Mittag-Leffler s’adressait à Molk dans les mêmes
termes que dans sa lettre à Poincaré.
Je m’adresse à vous en me trouvant dans un grand souci.
M. Duporcq qui ne connaît ni les mathématiques, ni l’allemand
et surtout pas Weierstrass a eu l’idée malheureuse de faire
en des notes une traduction des lettres de Weierstrass où il
lui fait dire toute espèce de bêtises. Je vous implore au
nom du grand maître dont nous sommes tous les deux les disciples
de vouloir bien m’aider à corriger les pires sottises.
J’ai fait quelques annotations au crayon pour fixer votre attention
sur quelques points. Mais il y en a bien d’autres encore, je
le sais. (Brefkoncept 3104)
Le 18 février, il remerciait Molk de lui avoir conseillé
de s’adresser à Vogt (Brefkoncept 3146). En effet, le 8 février,
Mittag-Leffler avait pris contact avec Vogt pour lui demander
de l’aide dans la révision des traductions de Duporcq et celui-ci
avait accepté la tâche.
Agréez, je vous en prie, l’expression de ma profonde reconnaissance
du service capital que vous avez bien voulu me rendre. C’est
bien vrai que c’est M. Duporcq et pas moi-même qui soit responsable
de la traduction mais il m’aurait été bien pénible de voir
Weierstrass se présenter devant le public français dans un
costume si ridicule que M. Duporcq lui a donné. Soyez bien
sûr que je garderai la discrétion que vous me demandez et
que M. Duporcq ne saura pas que c’est vous qui m’a aidé. (Lettre
de Mittag-Leffler à Vogt — IML — Brefkoncept 3147)
Je vous renvoie la première feuille corrigée avec le même courrier. Je vous prie de vouloir bien vous occuper vous-même de l’affaire et de voir que M. Duporcq accepte les changements que je propose. Sinon je suis forcé de demander que sa traduction sorte des notes. Je ne suis pas forcé d’accepter des notes dans un travail de moi. Il faut m’envoyer encore une épreuve corrigée et cela en deux exemplaires. M. Runge qui est très compétent a bien voulu se charger de revoir le texte allemand. La seconde feuille vous sera envoyée demain.
Merci de vos tirages à part qui m’ont beaucoup aidé à terminer votre bibliographie.44endnote: 4 Voir §§ 184 et 187.
Sitôt que le tome d’Abel sera terminé je commencerai avec votre notice.55endnote: 5 Voir § 176.
A vous de cœur
M. L.
ADftS 1p. IML 3161, Mittag-Leffler Archives, Djursholm.
Time-stamp: " 2.05.2019 23:10"
Notes
- 1 Voir § 152.
- 2 Duporcq avait été le secrétaire du congrès des mathématiciens de Paris et était donc chargé de l’édition des actes de ce congrès.
- 3 Le traducteur désintéressé dont parle Mittag-Leffler est Henri Vogt, professeur à l’université de Nancy. En effet, Molk, à qui Mittag-Leffler s’était plaint des traductions de Duporcq, avait indiqué que Vogt lui semblait compétent pour ce travail. Le 31 janvier, Mittag-Leffler s’adressait à Molk dans les mêmes termes que dans sa lettre à Poincaré. Je m’adresse à vous en me trouvant dans un grand souci. M. Duporcq qui ne connaît ni les mathématiques, ni l’allemand et surtout pas Weierstrass a eu l’idée malheureuse de faire en des notes une traduction des lettres de Weierstrass où il lui fait dire toute espèce de bêtises. Je vous implore au nom du grand maître dont nous sommes tous les deux les disciples de vouloir bien m’aider à corriger les pires sottises. J’ai fait quelques annotations au crayon pour fixer votre attention sur quelques points. Mais il y en a bien d’autres encore, je le sais. (Brefkoncept 3104) Le 18 février, il remerciait Molk de lui avoir conseillé de s’adresser à Vogt (Brefkoncept 3146). En effet, le 8 février, Mittag-Leffler avait pris contact avec Vogt pour lui demander de l’aide dans la révision des traductions de Duporcq et celui-ci avait accepté la tâche. Agréez, je vous en prie, l’expression de ma profonde reconnaissance du service capital que vous avez bien voulu me rendre. C’est bien vrai que c’est M. Duporcq et pas moi-même qui soit responsable de la traduction mais il m’aurait été bien pénible de voir Weierstrass se présenter devant le public français dans un costume si ridicule que M. Duporcq lui a donné. Soyez bien sûr que je garderai la discrétion que vous me demandez et que M. Duporcq ne saura pas que c’est vous qui m’a aidé. (Lettre de Mittag-Leffler à Vogt — IML — Brefkoncept 3147)
- 4 Voir §§ 184 et 187.
- 5 Voir § 176.